Newsletter

Le site de production du groupe Schüller sis à Herrieden, en Franconie (Bavière). © Schüller Mobelwerk GmbH

4.12.2025

L’industrie allemande du meuble de cuisine retrouve de la stabilité

Les fabricants allemands de cuisines voient poindre les signes d’un retour à l’équilibre. Après deux années de contraction, la filière a ainsi limité le recul de son activité – portée par un rebond des commandes et un mois de juillet positif – à 1,2 % lors des sept premiers mois du cru 2025. Selon l’Association allemande de l’industrie des meubles de cuisine (VdDK), l’exercice devrait d’ailleurs se solder par un chiffre d’affaires stable, autour de 5,6 milliards d’euros. Néanmoins, cette “accalmie” est à considérer au regard d’un contexte complexe : ralentissement du marché du logement (notamment neuf), pression réglementaire accrue, difficultés à l'export et pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Aussi les entreprises misent-elles sur l’efficacité énergétique, la circularité et la formation pour préserver la compétitivité du “Made in Germany”.

No items found.

L’industrie allemande du meuble de cuisine semble retrouver des couleurs…

En effet, selon les information publiées par l’Association allemande de l’industrie des meubles de cuisine (Verband der Deutschen Küchenmöbelindustrie, ou VdDK) en septembre dernier, les fabricants d’outre-Rhin ont réalisé 3,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires entre janvier et juillet 2025, soit un repli limité à 1,2 % par rapport à N-1. De plus, le mois de juillet s’est révélé encourageant, en affichant une progression de 5 % (428 M€), tandis que la valeur des commandes enregistrées lors des huit premiers mois a augmenté de 2,6 %.

« Après deux années de recul, nous observons des signes tangibles de stabilisation, même si le marché reste chahuté », souligne ainsi Jan Kurth, directeur général de VdDK.

À en croire cet dernier, le secteur – qui compte 46 fabricants et environ 17 700 salariés, – semble d’ailleurs s’orienter vers une année 2025 affichant un chiffre d’affaires stable, autour de 5,6 milliards d’euros. Une estimation de l’atterrissage jugée « prudemment optimiste », et que M. Kurth justifie en évoquant notamment la hausse du revenu réel des ménages et la perspective que les achats de cuisines différés soient prochainement réalisés. Il compte par ailleurs sur l’investissement public et « l’effet turbo de la construction » pour nourrir – sur le long terme – la “reprise”. Jan Kurth a cependant tenu à rappeler que le ralentissement du logement neuf pèse lourdement sur le secteur. De fait, sous l’impulsion de VdDK, plusieurs acteurs du bâtiment, du meuble et de l’aménagement ont créé l’initiative “La force économique nationale de l’Allemagne”, afin de réclamer davantage de mesures politiques en faveur du logement. Enfin, Jan Kurth a souligné que la branche pouvait également tirer parti de la rénovation du parc existant.

L’industrie allemande en chiffres (entre janvier et juillet 2025)

  • 3,3 Mds de CA : – 1,2 % vs. N-1
  • 1,8 Md € de CA sur le marché domestique : –1,4 % vs. N-1
  • 1,5 Md € de CA à l’export : –1 % vs. N-1
  • Exportations vers la France : 337 M €, soit – 4,3 % vs. N-1
  • 17 700 salariés dans 46 entreprises
  • Chiffre d’affaires prévisionnel 2025 : 5,6 Mds €

Des marchés à l’export contrastés

Sur le marché domestique, les industriels d’outre-Rhin ont réalisé, au cours des sept premiers mois de l’exercice en en cours, un chiffre d’affaires de 1,8 milliard d’euros, soit une baisse de 1,4 % par rapport à 2024. Pour leur part, les exportations ont reculé de 1 %, pour atteindre 1,5 milliard d’euros ; soulignons d’autre part que, avec un taux d’exportation de 46 %, l’industrie allemande du meuble de cuisine est nettement plus tournée vers l’international que la filière meuble dans son ensemble (taux d’exportation de 34 %).

Mais revenons-en à ces résultats à l’export, qui dévoilent une Europe affichant des résultats disparates. Ainsi la France, premier débouché extérieur, recule de 4,3 % à 337 millions d’euros sur les sept premiers mois de l’année, tandis que la Belgique (–0,9 %), le Royaume-Uni (–0,1 %) et la Tchéquie (–3,7 %) se tassent légèrement.

En revanche, les Pays-Bas (+6,6 %), l’Autriche (+2 %), la Suisse (+4 %) et surtout l’Espagne (+10,9 %) – portée par un marché du logement en plein essor – affichent une dynamique soutenue.

Quant au marchés extra-européens, ils se contractent nettement : les ventes vers la Chine chutent de 26,6 % par exemple, tandis que celles à destination des États-Unis reculent de 17,4 % ; du reste, la nouvelle taxe de 15 % sur les importations européennes, entrée en vigueur le 7 août 2025 aux USA, accentue les incertitudes. Cependant, 80 % des fabricants allemands prévoient de maintenir leurs investissements sur le marché américain et participeront à nouveau, en février 2026, au salon KBIS à Orlando, dans le cadre du pavillon collectif allemand.

Enfin, les importations vers l’Allemagne demeurent marginales : 98,7 millions d’euros au total sur sept mois, provenant principalement de Pologne, d’Italie, de Lituanie et d’Autriche.

© VdDk

Un environnement réglementaire de plus en plus lourd

Si la conjoncture se stabilise, la complexité administrative, pour sa part, explose ! Outre les droits de douane et la volatilité des taux de change, les industriels font face à de nombreuses barrières non tarifaires ainsi qu'à des exigences réglementaires. Et, parmi ces dernières, l’EUDR (règlement européen sur la déforestation) cristallise les inquiétudes puisque, à compter du 30 décembre 2025, les entreprises devront prouver la traçabilité “zéro déforestation” de leurs approvisionnements. Or une enquête de l’association de l’industrie allemande du bois (Hauptverband der Deutschen Holzindustrie, ou HDH) évalue les coûts d’implémentation et de conformité à des montants « à six chiffres », entre logiciels, ressources humaines et échanges de données avec les fournisseurs et clients.

Dans ces conditions, près de 60 % des entreprises admettent ne pas pouvoir être prêtes à temps. Aussi VdDK plaide-t-il pour un assouplissement : création d’une catégorie “risque zéro” pour les matières premières issues de pays sans risque de déforestation, et limitation des obligations de preuve aux seuls “metteurs” d'envergure sur le marché. Objectif : réduire la complexité administrative, en particulier pour les PME.

Des entreprises engagées dans la durabilité… et la formation

Sur le terrain industriel, les fabricants allemands poursuivent un cap clair : efficience, circularité et production responsable. Jugez plutôt : les usines s’équipent massivement en photovoltaïque, valorisent les déchets de bois pour chauffer leurs ateliers, utilisent des matériaux recyclés (plastiques, panneaux de particules à base de bois recyclé) et privilégient les approvisionnements régionaux.

Du reste, cette logique s’étend aux projets pilotes. Par exemple, l’initiative “Möbel – Material Re:Turn”, lancée en mai 2025 en Rhénanie-du-Nord–Westphalie, vise à mettre en place un système de reprise et de recyclage des anciennes cuisines : démontage, réutilisation ou récupération des matériaux pour réintégration dans la production. Ce projet s’inscrit d’ailleurs dans le cadre de la Table ronde “Économie circulaire NRW”, initiée par les ministères régionaux de l’Environnement, de l’Économie et du Climat.

Et, pour répondre au manque de main-d’œuvre qualifiée, la filière mise sur la formation. À titre d’exemple, la "Lehrfabrik Möbelindustrie” – un centre d’apprentissage reproduisant le processus industriel complet d’une entreprise de meubles –, inaugurée à Löhne en novembre 2024, sera bientôt dotée d’un bâtiment d’hébergement de 30 chambres, destiné aux stagiaires venus de régions éloignées ; les travaux ont d’ailleurs débuté, pour une ouverture prévue en août 2026.

Les tendances du marché

À en croire les enquêtes menées par VdDK en matière de tendances, les tons beiges et verts dominent désormais les collections, tandis que le blanc, le gris et le bleu demeurent des valeurs sûres. Toutefois, le noir, vedette des années précédentes, recule au profit de palettes mates et lumineuses, souvent associées au bois naturel.

Pour leur part, les formes organiques, les angles arrondis et les façades à rainures sont très prisées.

Côté matériaux, le placage bois, le stratifié, le mélaminé, la laque UV, l’acrylique, le linoléum et le bois massif progressent, tandis que les plans de travail misent de plus en plus sur la céramique, le quartz composite et la pierre naturelle.

Quant aux styles les plus prisés, VdDK mentionne le minimalisme contemporain – lignes épurées, façades sans poignées, plans fins – et le “moderne campagnard”, avec ses façades à cadre. Néanmoins, la montée en puissance du “Japandi” (fusion des esthétiques japonaise et scandinave) s’impose comme un phénomène fort : tons terre, bois clair et design épuré.

Enfin, les fabricants développent également des concepts d’aménagement transversaux, étendant leur offre à la salle à manger, au séjour, à la buanderie ou à la salle de bains, afin de permettre aux particuliers de réaliser une continuité esthétique de l’espace domestique.

Abonnez-vous à notre Newsletter pour être toujours à jour sur nos dernières actualités.